Conférence mondiale contre le racisme,
la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance, qui y est associée.

Monsieur le Président,

En tant que Supérieur Général de la Fraternité Notre Dame, je suis heureux de pouvoir adresser à la Conférence ces quelques réflexions et je vous remercie, Monsieur le Président, du temps que vous m’accordez.

La cause de la discrimination raciale et de la discrimination en général est un sujet qui me tient à coeur, car il est le vecteur d’un nombre incalculable de souffrances et d’humiliations infligées le plus souvent aux plus pauvres et aux plus démunis.

On peut dire que la discrimination est l’apanage de la haine et le ferment de bien des guerres. Notre terre est déchirée. Notre terre saigne du poids de l’incompréhension et de l’intolérance. A l’heure présente, le cri des pauvres et des sans-abris, le cri des rejetés par le fait de leur race, de leur classe ou de leur religion monte jusqu’au ciel.
Partout, nous voyons peuple contre peuple, ethnie contre ethnie, tribu contre tribu, religion contre religion.
Rejets des minorités, sectarisme et discrimination sont des fléaux infligés à des centaines de milliers d’hommes et de femmes qui, en fait de droit à la liberté, n’ont qu’à peine le droit de vivre et de survivre.
Les effets dévastateurs de la discrimination raciale ou ethnique se font sentir jusqu’aux extrémités de notre terre. Quel pays peut se vanter d’en être totalement intact ?

Pourtant racisme, xénophobie, rejet de l’étranger, sont des notions qui ne devraient même plus être débattues tant il est évident qu’ils sont contraires aux droits de l’homme.
L’histoire de l’humanité nous a montré tant de fois les tragédies engendrées par le racisme et la xénophobie. Le 20ème siècle n’a que trop incarné ces intolérances. Nous portons l’apartheid comme un vêtement de honte, un passé dont nous ne sommes pas fiers.

Si des progrès ont été faits en ce domaine depuis quelques années, et tout particulièrement ici, en Afrique du Sud, nous devons nous rendre à l’évidence que tout reste encore à faire. Et nous devrions être tristes de voir encore triompher, sous prétexte de différence raciale ou religieuse, la haine des minorités, l’écrasement des petits.

En tant qu’homme religieux, à la tête d’une organisation humanitaire internationale, laissez-moi vous dire qu’à la Fraternité Notre Dame, nous nous heurtons à ce problème de racisme chaque jour, particulièrement dans les missions de secours d’urgence où nous intervenons. Je pense au Rwanda, à l’ex-Yougoslavie, au Kosovo, etc...
La guerre fratricide, la haine et le sang, outils du mal incarné, déferlent de tous les horizons. Des séditions se fomentent contre le faible. On met de côté l’étranger. On met de côté le réfugié, on met de côté celui qui ne pense pas comme l’a décidé une certaine majorité.

Et que dire hélas de la France ? Ses frontières sont peut-être ouvertes mais son coeur est refroidi. Le sens de l’accueil de nos ancêtres a fait place au rejet farouche de l’étranger.

A ce propos, j’aimerais parler du sujet délicat de la discrimination religieuse. Car il faut l’avouer, dans bien des pays et tout spécialement en Europe, en France, la liberté religieuse n’est pas appliquée, loin s’en faut.
Un vent de persécution s’est abattu depuis plusieurs années sur les minorités religieuses, sur les jeunes Congrégations. Ce jugement partial qualifie tout de “secte”. Du moment que vous n’appartenez pas aux institutions religieuses majoritaires et établies, vous devenez suspect. Le sceau des préjugés et de la désinformation est apposé à toutes vos actions. Tout devient soudain suspicieux en vous, même si vos intentions sont droites, même si votre travail ne fait que secourir les plus pauvres et relever les malheureux. Nous voyons cette situation s’aggraver et ceci nous fait beaucoup souffrir. Je sais que cette injustice fait aussi souffrir les hommes droits qui ont à coeur, comme vous Monsieur le Président, de défendre les droits de l’homme, d’assurer la liberté et la justice pour tous.

Toute organisation religieuse doit pouvoir agir et évoluer librement sans entrave, du moment que ses actions ne vont pas contre l’intérêt du bien public. Le racisme, rejet de l’autre, ne doit pas s’attaquer aux individus, pas plus qu’il ne doit s’attaquer aux groupes religieux. Pourquoi vouloir écraser, faire disparaître des communautés religieuses sous prétexte qu’elles ne pensent pas exactement comme les grandes institutions religieuses ?

Nous souhaitons très vivement que cesse cette campagne anti-religieuse, véritable ségrégation morale. Nous souffrons de cette grave intolérance qui dénonce n’importe qui, traite de secte n’importe quoi, dans le but d’éliminer pour mieux régner.

Nous souhaitons que les esprits s’apaisent, que les mentalités s’ouvrent à la diversité. Que tous puissent travailler sur le plan spirituel, moral et humanitaire dans un climat d’égalité ; afin que notre futur se construise sur du solide, et que demain, les enfants du monde puissent se respecter, penser, agir, et vivre en paix, sans peur de la délation qui mène toujours à la persécution et au sectarisme.


[Fin de la Déclaration]

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